Fragment autobiographique 17

À la fin de mon adolescence j’ai décidé de tomber amoureux. J’ai choisi cette fille car elle avait rejoint notre bande de rôlistes depuis peu de temps et n’était pas très belle. Selon moi, ça devait augmenter mes chances d’être aimé en retour. Elle a accueilli mes déclarations enflammées avec flegme et sympathie. Je lui écrivais trois à quatre fois par semaine, lui racontant ma vie sans la moindre retenue. Nous nous voyions aussi souvent qu’elle le pouvait. Il ne s’est rien passé entre nous. Quand elle est sortie avec un des types de notre petit groupe, considéré comme un bellâtre frimeur et superficiel, j’en ai conçu une rancœur énorme. J’ai consacré beaucoup de temps et d’énergie à tenter d’humilier et rabaisser ce type. Souvent ça a porté ses fruits.

Au bout de deux ans j’ai fui cette situation insupportable en devenant clochard à trois cent kilomètres de là.

 

(illustration: Labaye)